Le mois dernier, les CRPV de Nouvelle-Aquitaine ont proposé un article faisant un point d’actualité sur le risque d’angiœdème bradykinique avec les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II, également appelés « sartans ».
En effet, la question d’introduire cette famille de médicament chez un patient ayant présenté un angiœdème bradykinique sous inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) se pose régulièrement.
Les IEC exposent, en effet, à un risque avéré d’angiœdème bradykinique, parfois sévères voire fatals. L’incidence de cet effet indésirable varie, selon les publications, entre 0,3 et 1,5 %. Au vu du nombre de patients traités en France par IEC, on estime que cela représenterait un peu plus de 5000 cas/an.
Le diagnostic est capital car il conditionne la prise en charge du patient : l’absence d’arrêt peut mettre en jeu le pronostic vital des patients (des cas fatals ont été rapportés), et, a contrario, un diagnostic erroné avec arrêt à tort, peut être préjudiciable sur le plan cardiovasculaire.
En pratique, qu’en est-il des sartans ? Exposent-ils au même risque ? Peuvent-ils être prescrits sans risque comme alternative ?
Les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II sont souvent présentés comme capables d’induire des angiœdèmes bradykiniques et leur usage est souvent déconseillé chez des patients ayant un antécédent d’angiœdème, sur la base de quelques publications d’angiœdèmes sous sartans, de récidive lors de switch IEC/sartan et d’une étude de 2005 retrouvant une augmentation des concentrations de bradykinine sous losartan.
Ce risque semble désormais démenti par différentes études robustes (cohorte rétrospective, méta-analyse) qui réfutent le lien supposé entre sartans et angiœdèmes bradykiniques et retrouvent un risque d’angiœdème avec les sartans comparable à celui observé sous placebo ou bêtabloquants.
Actuellement, les recommandations conjointes de 2022 du Collège américain de cardiologie (American College of Cardiology) et de l’Association américaine du cœur (American Heart Association) pour la prise en charge de l’insuffisance cardiaque précisent que les sartans peuvent être utilisés comme alternative aux IEC en cas de toux intolérable ou d’angiœdème.
En France, le CREAK (Centre de Référence des Angiœdèmes) indique que les sartans peuvent être utilisés comme alternative aux IEC en cas d’antécédent d’angiœdème induit par un IEC.
Par ailleurs, il ne préconise plus l’arrêt des sartans en cas d’angiœdèmes récidivants mais les considère plutôt comme des angiœdèmes mastocytaires spontanés, nécessitant des posologies plus élevées d’antihistaminique entre 2 et 4 comprimés/j (comme dans l’urticaire chronique).
N’hésitez pas à solliciter votre CRPV en cas de suspicion d’angiœdème à la bradykinine iatrogène.
Un avis au CREAK est également possible creak@chu-grenoble.fr ou par téléphone 24h/24 pour les cas urgents (astreinte).
Référence :
Bulletin d’Information en Pharmacovigilance de Nouvelle-Aquitaine – n°16 – octobre 2025
