Les gliflozines, une nouvelle classe d’antidiabétique oral

Article extrait de VIGINEWS n°12

Dans l’Union Européenne, la dapagliflozine, premier représentant des gliflozines, a été autorisée fin 2012 suivi par d’autres inhibiteurs de SGLT2 avec canagliflozine, empagliflozine, ertugliflozine et sotagliflozine.
En France, la canagliflozine, la dapagliflozine et l’empagliflozine bénéficient d’un avis favorable de la Haute Autorité de Santé (HAS) pour l’accès au remboursement.

Malgré cet avis favorable et en raison de l’échec de négociation avec le Comité Economique des produits de santé (CEPS) pour définir le prix de remboursement, les laboratoires n’avaient pas commercialisé leur médicament. Un accord a été trouvé en 2020 pour la dapagliflozine (FORXIGA®), qui devient alors la première gliflozine disponible en France, indiquée chez les patients adultes atteints de diabète de type 2, en bithérapie en association à la metformine ou en trithérapie en association à la metformine et aux sulfamides hypoglycémiants. Une spécialité en association avec la metformine est également commercialisée (XIGDUO®), avec une indication supplémentaire en association avec l’insuline.

Mécanisme d’action
La majorité du glucose filtré par les glomérules (80%) est réabsorbée par SGLT2 situé sur la membrane apicale et localisé le long des segments S1 et S2 du tubule proximal. Le glucose restant est réabsorbé en aval par le co-transporteur SGLT1 au niveau du segment S3. L’énergie nécessaire à ce transport est fournie par la pompe Na+/K+-ATPase située à la membrane baso-latérale. Le glucose diffuse ensuite passivement hors de la cellule via le transporteur GLUT2 localisé sur la membrane baso-latérale le long des segments S1 et S2 et GLUT1 situé au niveau du segment 3 (Figure).

Chez les patients atteints de diabète de type 2, il a été montré une réabsorption accrue de glucose et de sodium médiée par la SGLT2, contribuant ainsi à maintenir et à aggraver l’hyperglycémie. En bloquant l’action de la SGLT2, les gliflozines provoquent l’élimination d’une plus grande quantité de glucose par l’urine, réduisant ainsi les niveaux de glucose dans le sang par un mécanisme indépendant de l’insuline. La glycosurie est associée à une perte de calories conduisant à une perte de poids. La réduction de l’hyperglycémie atténue la toxicité du glucose et réduit ainsi la résistance à l’insuline et améliore la fonction de la cellule β pancréatique. Par ailleurs des effets délétères sont à noter avec l’augmentation de la sécrétion de glucagon qui contribue à augmenter la production hépatique de glucose et la cétogenèse. Outre la glycosurie, l’inhibition de la SLGT2 induit également une natriurèse qui s’accompagne d’effets intra-rénaux et intra-vasculaires bénéfiques (néphroprotection, cardioprotection et baisse de la pression artérielle). L’efficacité des gliflozines dépend de la fonction rénale et l’efficacité est réduite chez les patients atteints d’insuffisance rénale modérée et elle est vraisemblablement absente chez les patients atteints d’insuffisance rénale sévère.

Effets indésirables
L’augmentation de la glycosurie par les gliflozines explique la survenue fréquente d’infections urinaires et génitales (vulvovaginites, balanites, prurits génitaux), parfois graves avec de très rares cas de fasciites nécrosantes du périnée (ou gangrènes de Fournier). Le profil de sécurité est aussi marqué par des effets associés à une déplétion volémique (déshydratation, hypovolémie ou hypotension) et des insuffisances rénales aiguës alors même que des effets néphroprotecteurs sont significativement démontrés avec les gliflozines. Des cas rares mais graves d’acidocétose diabétique, pouvant engager le pronostic vital, issus de la notification spontanée ou de publications, ont été rapportés avec certaines gliflozines. Cet effet a été rapporté chez les patients diabétiques de type 2 mais survient plus fréquemment chez les patients diabétiques de type 1. L’analyse des cas a révélé parfois un profil atypique de survenue, avec l’absence d’hyperglycémie majeure associée voire une euglycémie. Une telle particularité chez les patients atteints de diabète de type 2 peut conduire à un retard de diagnostic et de prise en charge de l’acidocétose. Une augmentation des amputations des membres inférieurs, principalement des orteils, a été confirmée chez les patients traités par canagliflozine comparativement à ceux traités par placebo (HR 1,97 ; 1,41–2,75). Le mécanisme responsable de cette augmentation du risque n’a pas été clairement identifié et un effet de classe n’est pas exclu. Plusieurs observations indiquent que les gliflozines peuvent modifier
l’homéostasie du calcium et du phosphate et donc potentiellement
affecter la masse osseuse et augmenter le risque de fracture.

D’un point de vue pharmacocinétique, la dapagliflozine et la canagliflozine sont transformées en métabolites inactifs par glucuronoconjugaison. La canagliflozine est également un substrat et un inhibiteur de la lycoprotéine P (voir VigiNews n°11 – rubrique interactions).

Perspectives
Des essais cliniques chez les patients diabétiques de type 2 traités par gliflozines versus placebo ont montré une diminution de la mortalité, un effet sur l’insuffisance cardiaque et un ralentissement de la progression de l’atteinte rénale. Au regard de ses bénéfices démontrés sur ces comorbidités
fréquentes, cette classe médicamenteuse est désormais positionnée comme une option préférentielle dans la stratégie de prise en charge du diabète de type 2 dans l’ensemble des recommandations internationales, incluant la prise de position de la Société Francophone du Diabète (SFD) publiée fin 2019. Enfin, le 15 octobre 2020, l’agence Européenne du médicament a approuvé la dapagliflozine dans le traitement de l’insuffisance cardiaque. En France, il faudra attendre l’avis de la HAS pour la décision d’un éventuel remboursement dans cette indication.

Références bibliographiques

  • Scheen, André J. Nature Reviews Endocrinology (2020): 1-22 ;
  • DeFronzo et al. Nature Reviews Nephrology 13.1 (2017): 11 ;
  • HAS « Traitement médicamenteux du diabète de type 2 : évaluation des gliflozines par la HAS » mise au point mise en ligne le 18 décembre 2019 disponible sur www.has-sante.fr ;
  • SFD « Avril 2020 la dapagliflozine (FORXIGA®, XIGDUO®) est disponible en France pour le traitement du diabète de type 2 de l’adulte » disponible sur www.sfdiabete. org ;
  • JORF n°0079 du 1 avril 2020 disponible à www.legifrance.gouv.fr ;
  • ANSM – lettre aux professionnels de santé disponible sur www.ansm.sante.fr.

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